Entre Elle & Lui  Kareshi Kanojo no Jijyo

Elle, c’est Yukino Miyazawa, une jeune fille de quinze ans qui est première de sa classe. En apparence, elle est douce et serviable, si bien qu’elle est admirée par tous ses camarades, mais elle cache sa véritable personnalité qui est aux antipodes de ce qu’elle veut bien montrer. En fait, elle est très prétentieuse et absolument pas gracieuse. Quant à ses résultats scolaires, ils sont dus à des heures de travail acharné (parfois pendant la nuit !), Yukino n’ayant aucune disposition naturelle dans ce domaine. De plus, la jeune fille travaille aussi dur non pas par envie de réussir mais pour continuer à l'être l'objet de l'admiration de tous.
Lui, c’est Soïchiro Arima, un garçon du même âge que Yukino et qui fait partie de la même école. Il est également premier de sa classe et premier ex-æquo de tout l’établissement avec Yukino. C’est un garçon très gentil qui cache derrière sa fausse assurance de grands complexes. Après être tombé sous le charme de Yukino, sans franchement la connaître, il tombera véritablement amoureux d’elle une fois qu’il aura découvert sa personnalité cachée.

Entre Elle et Lui, une relation compliquée va naître : Yukino est en effet très jalouse de Soïchiro au début à cause de ses résultats scolaires qui sont aussi bons que les siens, puis elle se sent honteuse le jour où il la voit au naturel (avec ses cheveux en bataille, vêtue d’un jogging informe, et laissant paraître son caractère de cochon), avant de commencer à le détester quand il exerce sur elle du chantage (en lui demandant de faire ses devoirs pour qu’il ne révèle pas à toute l’école qu’elle est loin d’être une fille modèle – stratagème monté en réalité pour passer du temps avec elle) et finalement à l’aimer en réalisant, qu’au fond, il est tout aussi hypocrite qu’elle !! Après s’être confiés l’un à l’autre, les deux jeunes gens finissent par s’avouer leurs sentiments respectifs et ainsi commence une étrange mais touchante histoire d’amour...

"Entre Elle et Lui" est l’adaptation des sept premiers volumes (plus le premier chapitre du huitième volume) du manga "Kareshi Kanojo no Jijyo" - communément raccourci en "KareKano" - qui compte 21 tomes en tout. En France, il a été édité dans le magazine Magnolia (qui a disparu au bout de 13 numéros) avant d’être publié en librairie chez Tonkam. Les deux supports sont relativement similaires au niveau de l’intrigue mais l’anime s’attarde davantage sur la psychologie de Yukino et de Sôichirô (au point de donner l’impression que l’anime se résume parfois à une étude psychologique des personnages) là où le manga est plus focalisé sur leurs sentiments. Il faut dire que c’est l’une des spécialités du réalisateur principal, Hideaki Anno (Nadia, Evangelion), de mettre l’accent sur les peurs et les doutes de ses héros. Paradoxalement, l’aspect comédie est également plus prononcé, ce qui permet de dédramatiser certains passages, en particulier ceux concernant Soïchiro qui sont plus sombres que ceux centrés sur Yukino.

L’anime se distingue aussi par une réalisation extrêmement originale à l’époque de sa première diffusion (mais depuis reprise dans des œuvres comme FLCL ou Abenobashi), mêlant des scènes d’animation classique avec des dessins qui semblent tout droits sortis du manga, des images live (notamment dans le générique de fin et les teasers tournés par les comédiens de doublage japonais), des photographies, des gribouillis d'enfants, des plans sur des éléments de signalisation routière (panneaux, feux) et de très nombreux textes incrustés à l’écran (qui ont été retouchés dans la version française afin de rendre l’anime plus accessible). Loin d’être des artifices, ces effets ont pour but de rendre la réalisation plus percutante dans les scènes comiques et inversement plus discrète dans les scènes sérieuses où les dialogues prennent le pas sur l’action. D’autres fois, ils sont utilisés pour nous renseigner sur l’état d’esprit des personnages. Deux épisodes sont encore plus originaux dans leur réalisation. Le premier est presque entièrement en noir et blanc (procédé déjà utilisé par Gainax dans Gunbuster) tandis que le second montre les personnages non pas dessinés et animés de manière classique mais comme des personnages de papier qu'on aurait découpés dans un journal et qu'on fait bouger dans tous les sens ! Le manga est plus classique dans sa forme, même si on retrouve des planches bourrées de textes, d'onomatopées et de personnages SD qui succèdent à des mises en page classiques du shôjo manga (motifs floraux, regards rougissants...)

L’anime aurait pu connaître une seconde saison mais selon une interview du président de Gainax, l’autrice du manga, Masami Tsuda, n’a apparemment pas apprécié le travail fourni par le studio, qu’elle aurait jugé trop différent du sien alors que l'histoire est pourtant fidèlement adaptée (seuls les épisodes 24 et 25 proposent des intrigues inédites). Il faut préciser que Masami Tsuda a quelque peu renié le début de son propre manga et s'est ensuite nettement éloignée du registre comique pour explorer le passé dramatique de certains personnages (dont Soïchiro - Yukino, elle, n'apparaissant que très peu dans cette partie). De plus, elle a fermement rejeté la demande de Hideaki Anno qui souhaitait s'éloigner des histoires du manga dans la seconde partie de l'anime, ce qui explique sans doute pourquoi, à partir de l’épisode 16, un autre réalisateur a pris en charge la série, même si celle-ci ne change pas radicalement de style et ne perd pas en qualité.

La série peut être divisée en deux parties : la première (épisodes 1 à 8), centrée sur les atermoiements de Yukino et Soïchiro, et la seconde (épisodes 9 à 26), mettant en scène de nouveaux protagonistes qui vont donner une direction un peu différente à l'histoire et s’attaquer à d’autres problèmes de société (familles recomposées, harcèlement à l’école, sentiment d’être rejeté...) La série ne se montre jamais moralisatrice et n’émet aucun jugement sur ses personnages, néanmoins on peut deviner des critiques sous-jacentes de certains sujets et notamment du système scolaire japonais où la réussite passe par des sacrifices tellement importants que des dérapages surviennent souvent. Ce sujet sera par la suite abordé dans des œuvres telles que GTO. Dans "Kare Kano", on apprend à fournir des efforts pour sa propre satisfaction et non dans l’espoir d’une reconnaissance sociale. En somme, pour connaître la réussite et le bonheur, il faut avoir le courage de vivre en étant soi-même.